Tritium dans la Loire : une association porte plainte contre EDF

Une association porte plainte contre EDF, après des mesures indiquant la présence de tritium dans l'eau. D'autres devraient suivre. Leur avocat, Arash Derambarsh, invoque la "mise en danger de la vie d'autrui", combinée au principe de précaution.

"Il s'agit d'une plainte inédite" martèle l'avocat Arash Derambarsh, joint par téléphone. Ce 30 juillet, il a porté plainte au nom de l'Association Ponthieu Marquenterre Solidaire (APMS) contre EDF et les directeurs de cinq centrales nucléaires situées le long de la Loire. Parmi elles, quatre (Chinon, Saint-Laurent-des-Eaux, Dampierre et Belleville) se situent en région Centre-Val de Loire.

 

Un tritium averti en vaut deux

L'action, qui se veut avant tout "symbolique", vise à dénoncer la "mise en danger de la vie d'autrui" et invoque le "principe de précaution" vis-à-vis des rejets des centrales nucléaires. Spécialisée dans la redistribution de surplus alimentaire et la lutte contre le gaspillage l'APMS ne s'était encore jamais attaquée au sujet de l'énergie atomique. Elle relaie en revanche très activement la communication de l'avocat et élu "anti-gaspillage" qui porte sa plainte contre EDF.

Une dizaine de jours plus tôt, un rapport de l'ACRO, l'Association pour le contrôle de la radioactivité dans l'ouest, a fait état d'une contamination au tritium de l'eau de la Loire, dont le maximum, à Châtellerault, était de 31 Bq/L. Une quantité qui reste trois fois inférieure au seuil de dépistage en vigueur dans l'Union européenne, à 100 Bq/L. Élément relativement peu radioactif (voir ci-dessous), le tritium est rejeté dans l'eau des rivières servant au refroidissement des installations nucléaires.
   

"Que les taux soient bas je m'en fiche : l'eau est polluée"

De son côté, EDF a fait valoir le contrôle strict et transparent de ses installations, avec "plus de 2000 à 3000 analyses par an" et le respect de la réglementation en accord avec l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN). Un contrôle dont les résultats sont d'ailleurs disponibles en ligne. Cette surveillance fait état, "entre le 1er janvier et le 31 mai 2019" de résultats "conformes et inférieurs aux limites réglementaires propre à chaque site".

"Que le taux soit bas, je m'en fiche : le fait est que l'eau est polluée", rétorque Me Derambarsh, qui fait également valoir le principe de précaution. "Cette contamination montre qu'en cas d'accident nucléaire, l'Île-de-France  par exemple est incapable de fournir de l'eau potable à 6 millions de personnes pendant 48 heures." La présence de tritium dans l'eau laisse en effet les associations anti-nucléaire présumer que d'autres polluants pourraient s'y retrouver en cas d'incident.
 

Pas de risque notable pour la santé

Concernant le tritium lui-même, le consensus scientifique actuel établit l'absence de risque notable, à court terme, pour la santé. Mais les recherches sur les effets à long terme de cette substance sur l'environnement sont encore en cours. Au taux de contamination de 10 000 Bq/L retenu par l'OMS, "quelqu'un qui boirait 2 litres d'eau par jour pendant tout une année" recevrait une dose "équivalente à un vol Paris-Tokyo" résume Jean-Michel Bonnet, directeur de la santé à l'Institut de radioprotection et sûreté nucléaire (IRSN).  Ce serait encore "dix fois moins qu'un scanner", assure-t-il.

Danger ou pas, "une vingtaine d'association" au total devraient porter plainte d'ici la rentrée, selon Arash Derambarsh.
Becquerel, millisievert et radioactivité
"3,6 Röntgen ? Pas terrible mais j'ai vu pire." Cette phrase prononcée par un personnage de la série Tchernobyl serait incompréhensible sans le contexte dramatique, dans lequel les personnages viennent de provoquer l'explosion accidentelle d'une centrale nucléaire. L'actualité elle aussi nous sature parfois de dosages et d'unités de mesure difficiles à saisir : en voici quelques-unes, fournie par la documentation de l'IRSN.

Le Becquerel

Le becquerel est l’unité de mesure de la radioactivité, d'après l'IRSN. Il correspond à une désintégration par seconde, quel que soit le type de rayonnement émis (α, β, γ ou neutron).
 
  • Un humain de 70kg a une activité de l'ordre de 130 Bq/kg
  • L'eau douce possède naturellement une radioactivité de l'ordre de 0,1 Bq/L
  • Limite des rejets considérés comme "non contaminés" par EDF : 1 Bq/L
  • Seuil de dépistage dans l'Union européenne 100 Bq/L
  • Valeur guide de l'OMS pour le tritium (qui reste sans effet sanitaire en ce qui concerne le tritium) : 10 000 Bq/L


Le Sievert

"Tout est poison, rien n’est poison : c’est la dose qui fait le poison" écrivait Paracelse, et en matière de radioactivité, le Sievert est l'unité par laquelle on mesure la dose de rayonnements reçue. Cette unité est utilisée pour estimer la dose de radioactivité subie par l'organisme et ses éventuels effets. Elle est le plus souvent rattachée à une période (mSv par heure, par an etc.) La radiotoxicité (mesurée en Sievert par Becquerel, ou Sv/Bq) varie d'un isotope à l'autre
 
  • La dose de radioactivité annuelle autorisée pour la population (hors rayonnement naturel et médecine) est de 1mSv. 
  • Une radio thoracique représente 0,14 m Sv en moyenne, un scanner aux rayons X 8,8 mSv
  • Un vol Paris-Tokyo représente, par rayonnement cosmique, une dose de l'ordre de 0,1 mSv en tout
  • En France, l'exposition à la radioactivité naturelle est de 2,4 mSv
  • La dose causée par la zone de Tchernobyl (hors zones de contrôle permanent) avoisinne 1 mSv/an

Période radioactive, période biologique

La demi-vie, ou période radioactive, est le temps nécessaire pour que l’activité d’une source diminue de moitié. Cette activité continue à décroître de façon exponentielle. La période biologique est la durée au bout de laquelle la moitié de l'élément est éliminé de l'organisme. Dans le cas du tritium, la période radioactive est d'environ 12 ans mais la période biologique se situe entre un mois et un an.
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